Colorée et aux goûts divers et variés, la cigarette électronique jetable attire les enfants de plus en plus jeunes.
Elle a beau être interdite à la vente, elle parvient à trouver son chemin en Belgique et à tomber entre de (très) jeunes mains. La puff, cigarette électrique jetable, est très appréciée des ados. Mais un phénomène inquiétant pointe le bout de son nez : ce “fléau” fait son apparition dans les écoles primaires.
“On a retrouvé une puff par terre dans les couloirs des 1re primaires. Le gamin l’avait piqué à ses parents. En 4e primaire, on a une élève qui a puff et ne s’en cache pas. Les parents sont désemparés”, révèle Christine qui enseigne en 3-4-5e primaire depuis 29 ans. “C’est la deuxième année que la puff est apparue à l’école.”
Dans une autre école, on constate que les petites veulent imiter les adultes et les grands frères. “Il y a quelques semaines, un enfant de 7-8 ans a amené une puff à l’école pour la faire goûter aux autres. On a convoqué les parents pour qu’ils soient plus attentifs car l’élève avait chipé la puff de son oncle”, témoigne le directeur Eric Berteau
“Ils en savaient plus que moi”
Selon une étude de l’Université d’Anvers de l’année passée, 10 à 20 % des élèves de 6e primaire déclarent vapoter. “Ce sont mes élèves qui m’ont tout expliqué. Ils en savaient plus que moi. Directement, ils ont identifié le goût à la couleur de la puff et ont deviné la marque. Ils sont vraiment au courant de tout ça”, confie Christine.
Le neveu de 14 ans d’une de ses collègues va à la frontière en France pas très loin de chez lui se fournir. “Dans mes classes, certains de mes élèves se disent accros”, indique un professeur en 3e primaire. “Ils m’ont montré l’envers du décor : un véritable petit business parallèle, organisé via Snapchat ou TikTok, avec des pubs pour de nouveaux goûts plus attrayants les uns que les autres.”
“Des bombes de nicotine”
Du côté des experts, on alerte sur les dangers de la puff qui croissent à mesure que l’âge diminue. “On sait que ça commence en primaire, on a eu des interpellations de directeurs qui voient des puffs circuler. Le problème des puffs, c’est la présence de nicotine à très forte concentration. Si un cerveau de moins de 25 ans entre en contact avec la nicotine, le risque de dépendance accrue de nicotine est tel qu’il sera extrêmement compliqué d’arrêter. Il sera dépendant à vie. Il y a des risques de développement du cerveau avec des problèmes d’hyperactivité, d’anxiété et une sensibilité accrue du cerveau à d’autres drogues comme l’alcool”, confirme Adrien Meunier, tabacologue à la Citadelle Liège. “Les puffs contiennent 20 mg de nicotine par millilitre. La dose moyenne de nicotine est 360 mg or une cigarette en contient 1 mg. Si l’enfant consomme une puff entière, c’est l’équivalent de 18 paquets de cigarettes ! Ce sont des bombes de nicotine qui créent des addicts à la nicotine et qui passeront, par après, à la cigarette”.
La puff que Christine a trouvée est une JR Alien au goût pastèque et qui fait de la lumière. “Un élève de 3e primaire m’a dit que la cigarette ne l’intéressait pas parce que ça pue mais les puffs aux super bons goûts et il ne peut plus s’en passer maintenant”, rapporte l’enseignante Magali. “Tout est fait pour attirer les enfants, ça les vise clairement. C’est le combo gagnant car les goûts sont très sucrés et masquent le goût de nicotine. Les jeunes n’ont pas l’impression de manger de la nicotine, ils pensent que ce sont des bonbons et quand ils s’en rendent compte, il est trop tard. S’ils essayent d’arrêter, ils peuvent avoir des symptômes de manque comme des tremblements, de la nervosité et de l’irritabilité”, insiste Adrien Meunier qui rappelle que l’e-cigarette vendue légalement peut aider un fumeur mais faire basculer un non-fumeur dans la dépendance.