Valérie Glatigny (MR), ministre de l’Éducation, entend bien faire appliquer la Déclaration de politique communautaire qui préconisait un tel décret.
La ministre de l’Éducation revient sur les enjeux liés à l’entrisme religieux au sein des écoles, et son plan pour l’objectiver.
Depuis la rentrée, les chantiers ne manquent pas dans l’enseignement. Pourquoi avoir souhaité vous atteler si rapidement au dossier de l’autocensure et des pressions exercées sur les enseignants ?
J’ai reçu plusieurs signaux que je ne pouvais pas ignorer. Bien sûr, le risque zéro n’existe pas, mais nous avons, en la matière, une obligation de moyens. Je ne veux pas créer de psychose, et l’objectif premier est celui de la prévention, mais nous souhaitons aussi protéger nos enseignants et pouvoir identifier plus rapidement les problèmes.
Les gouvernements précédents ne se sont pas emparés de ce dossier. Certains qualifiaient cet enjeu de marginal. Comment analysez-vous cela ?
Je me garderai bien de qualifier ce phénomène et d’y apposer un adjectif. Ce que je veux précisément faire, c’est objectiver la situation. Tel est le but du monitoring confié au service général de l’inspection : aboutir sur une photographie claire.
Les retours qui remontent du terrain sont-ils bruxellois ?
Non, ils concernent aussi la Wallonie.
Sont-ils majoritairement liés à la radicalisation islamiste ?
C’est une réalité que l’on ne peut pas nier, mais nous avons constaté aussi des faits de radicalisations complotistes qui peuvent inciter au repli et à des actes violents. Par ailleurs, ce qui ressort de notre enquête réalisée auprès des enseignants, c’est l’enjeu qui s’articule autour du respect dû à l’enseignant. On a l’impression que la relation entre le monde de l’école et le reste de la société se délite un peu, ce qui participe à la pénurie des enseignants. En ce sens, nous devons travailler sur le partenariat entre l’école et les parents. Cette collaboration permettra dailleurs de lutter contre le décrochage d’un enfant.
En France, la loi interdit à tous les élèves de porter des signes religieux. Ce n’est pas le cas en Belgique : cette interdiction est laissée à l’appréciation des directions. Et cela peut engendrer une concurrence entre les établissements. Souhaitez-vous établir une règle claire et unique pour toutes les écoles ?
Je veux simplement rappeler la phrase inscrite dans la Déclaration de politique communautaire : “le gouvernement interdira par décret le port de signes convictionnels à tous les enseignants de l’enseignement obligatoire du réseau officiel, à l’exception des professeurs de religion”.
C’est un enjeu qui vous est remonté à travers les témoignages ? La place visible du religieux dans les salles des profs peut être compliquée à gérer ?
Oui, il y a chez certains une espèce de sidération: celle de ne pas savoir comment réagir, et donc d’être un peu désarmés par rapport à cet enjeu. [NdlR: il n’existe pas de statistiques sur le port du voile par les enseignants]
Et pour le port de signes convictionnels par les élèves ?
Je vais me tenir à ce qui est déjà inscrit dans la Déclaration. Nous analyserons à l’avenir s’il y a des problèmes majeurs en lien le port de signes convictionnels. Je rappelle aussi que mon objectif est de lutter contre les extrémismes violents qui ne sont pas uniquement religieux.
Face à ces enjeux, souhaitez-vous renforcer le cours de philosophie et citoyenneté dans l’enseignement officiel, quitte à supprimer des horaires obligatoires les cours de religions ?
Le cours de philosophie et de citoyenneté est fondamental pour apprendre à décoder les discours identitaires, la désinformation, les replis sur soi, pour renforcer son esprit critique. Ce n’est pas l’alpha et l’oméga, bien sûr, mais c’est un cours qui répond aux missions importantes de l’enseignement.
Vous n’ouvrez donc pas une nouvelle réflexion sur l’avenir des cours de religion dans l’enseignement officiel ?
Dans le cadre de la Déclaration de politique communautaire, on ira aussi loin que possible pour développer le cours de philosophie et de citoyenneté.