La cheffe de groupe Écolo/Groen Nadia Kammachi incrimine la direction de l’Athénée Bracops.

L’interpellation, qui doit avoir lieu ce jeudi au conseil communal d’Anderlecht, s’annonce explosive. Dans le texte de son intervention, texte qui est déjà parvenu à La Libre, Nadia Kammachi, cheffe de groupe Écolo/Groen à Anderlecht, dénonce le “harcèlement vestimentaire” et la “discrimination” qui se déroulerait au sein de l’Athénée Joseph Bracops d’Anderlecht.

“Depuis plusieurs mois, l’équipe de direction de l’Athénée Joseph Bracops a instauré un contrôle systématique des tenues vestimentaires à l’entrée de l’établissement, écrit Nadia Kammachi dans son interpellation. Chaque élève est scruté dès son arrivée. Des consignes strictes ont été données aux éducateurs pour filtrer les élèves à la porte, au point que certains ne peuvent même plus passer par l’entrée qu’ils utilisaient habituellement, mais sont obligés de passer par la rue de la Procession – là où le contrôle peut être ‘optimisé’.”

Les termes employés sont forts. “Je le dis clairement : ce que vivent les élèves aujourd’hui s’apparente à du harcèlement, qui vient d’adultes, de figures d’autorité, reprend Nadia Kammachi. On les juge, on les intimide, on les renvoie chez eux pour une matière de tissu, qui serait assimilée à un jogging ou une robe jugée inappropriée.”

“Est-ce qu’inconsciemment une robe longue colorée portée par une Natacha serait plus facilement acceptée qu’une robe unie portée par une Rachida?”

L’élue écologiste y voit aussi une discrimination. “Soyons lucides : lorsqu’une élève porte une robe longue, ce n’est pas tant la coupe qui dérange, mais qui la porte. Son prénom, son origine, son histoire personnelle, ajoute-t-elle. Est-ce que, inconsciemment, une robe longue à motifs colorés portée par une élève s’appelant Natacha serait plus facilement acceptée qu’une robe unie, sobre, noire, portée par une élève prénommée Rachida ?”

Interrogée par La Libre, Nadia Kammachi s’explique sur sa décision d’interpeller le Collège communal. “Je reçois énormément de retours d’élèves au sujet de cette problématique, car j’ai été membre de l’association de parents de cette école. Je ne voulais pas agir tout de suite, en espérant que le temps allait peut-être améliorer les choses. Mais cela devient de pire en pire. J’ai donc décidé de me faire la porte-parole de centaines d’élèves qui vont à l’école la boule au ventre”, assure l’ancienne échevine anderlechtoise.

L’élue Écolo l’insinue dans son interpellation : la discrimination que subiraient les élèves serait liée à leur religion.

“Est-ce que les refus ont une connotation religieuse ? Je ne sais pas, mais c’est la question que je pose. Ce que je dénonce, c’est que les enfants ne sont pas tous sur un pied d’égalité”, conclut-elle.

Contactée par La Libre, la direction de l’Athénée Bracops préfère laisser au pouvoir organisateur – la commune d’Anderlecht – le soin de s’exprimer. “Les élèves ne sont pas renvoyés en cas de non-respect de la tenue vestimentaire, assure Luiza Duraki (PS), échevine anderlechtoise de l’Enseignement, qui conteste formellement les accusations. Un coup de fil est passé aux parents pour que ceux-ci puissent leur apporter une tenue. Sinon, les parents envoient un écrit pour que l’élève puisse rentrer se changer chez lui. Aucun élève n’est sanctionné et encore moins renvoyé.”

Une plainte en diffamation contre Nadia Kammachi

Luiza Duraki précise que le règlement d’ordre d’intérieur de l’école date de 2008. “Alors oui, les jupes longues et robes longues sont refusées si ça traîne par terre. Mais il n’y a pas de discrimination selon que l’élève est de telle ou telle origine”, ajoute l’échevine, qui précise que la direction de l’Athénée envisage de “porter plainte pour diffamation contre Nadia Kammachi”.

Le moins que l’on puisse écrire, c’est que le contenu de l’interpellation scandalise les membres de la majorité anderlechtoise.

“Je déplore ce propos totalement incendiaire, ajoute Gaëtan Van Goidsenhoven (MR), chef de file des libéraux à Anderlecht. Je veux exprimer mon soutien et ma solidarité à l’équipe de l’Athénée Bracops, qui s’efforce d’apporter le meilleur à ses élèves.”

“Après la question du voile, sa proposition d’organiser une prière au stade d’Anderlecht pour la fête de l’aïd, c’est rebelotte. Mme Kammachi vient cette fois avec la question de l’abaya, puisque qu’on a bien compris que l’interpellation portait là-dessus. Aura-t-on droit à une interpellation communautaire d’Ecolo chaque mois ?”

Sofia Bennani (Les Engagés), conseillère communale à Anderlecht et députée bruxelloise.

“Je n’ai jamais entendu parler de ce type de problèmes dans cette école. Après la question du voile (NdlR : en 2023, alors échevine, Nadia Kammachi avait tenté de faire voter une autorisation du port du voile dans l’administration), sa proposition d’organiser une prière au stade d’Anderlecht pour la fête de l’Aïd, c’est rebelote. Mme Kammachi vient cette fois avec la question de l’Abaya, car on a bien compris que l’interpellation portait là-dessus, s’irrite Sofia Bennani (Les Engagés), conseillère communale à Anderlecht et députée bruxelloise. Aura-t-on droit à une interpellation communautaire d’Écolo chaque mois ? Écolo Anderlecht doit sortir des débats exclusivement communautaristes pour construire une société plurielle.”