Etre connecté et surchargé en permanence n’est pas bénéfique pour le cerveau. Comment régénérer son cerveau et mettre en place des pauses au sein de sa vie quotidienne ? Pour Tendances Première, Bruno Humbeeck, psychopédagogue à l’UMons, propose des pistes de solution afin de s’accorder une pause cérébrale.
Réapprendre à se donner des vraies pauses
Permettre au cerveau de se régénérer est tout aussi important que de le faire carburer tout le temps, le risque étant dans ce dernier cas de créer une lassitude mentale et une perte d’estime de soi, explique Bruno Humbeeck.
Pour lui, les mécanismes que l’on doit faire taire sont les fonctions exécutives, comme lorsque l’on planifie ou que l’on réfléchit au passé. “Or, ce n’est pas facile surtout à notre époque où notre attention est constamment sollicitée”.
Les portables qui nous accompagnent partout nous font souvent scroller, une activité dont on ne retient souvent rien où l’on est en mode vaguement focalisé, qui nous donne un sentiment de fausse détente car elle sollicite tout de même notre cerveau. “On a été pris au piège par des personnes qui ont fait de notre attention un objet commercial et essaient de nous maintenir en éveil via des algorithmes”.
Pour le psychopédagogue à l’UMons, il ne faut pas confondre ‘se détendre’ et ‘mettre son cerveau en pause’. “On peut très bien se détendre en jouant une partie de kicker, mais le cerveau ne va pas réellement se mettre en pause de la même façon que quand vous ne faites vraiment rien ou si vous vous livrez à quelque chose qui ne sollicite que des automatismes cérébraux”.
Permettre aux enfants ‘d’être dans la lune’
Comme l’indique Bruno Humbeeck, les enfants ont plus de talent que les adultes de ne rien faire, en pratiquant le vagabondage mental durant lequel les pensées se mettent à flotter vers l’imaginaire, relève Bruno Humbeeck. “Lorsque l’on voit des enfants ‘dans la lune’, il faut surtout ne pas les ramener brutalement sur Terre. Ils sont en train de reconstituer leur réserve de travail selon l’expression du philosophe Hume […] Cela permet de faire circuler d’autres parties du cerveau et le régénère très bien”.
Le psychopédagogue, qui travaille depuis 2024 comme expert au cabinet de la ministre MR de l’enseignement Valérie Glatigny, espère que les enseignants ont compris que ces enfants dans la lune étaient des enfants “terriblement talentueux et qu’il faut les laisser de temps en temps dans la lune”. Bruno Humbeeck nuance toutefois : “Je n’ai pas dit qu’il fallait rester dans la lune, ça, c’est plutôt la folie […] Les enfants dans la lune font des allers-retours entre le vagabondage mental et les moments de concentration”.
Afin de lui donner encore plus de valeur, il souligne que le vagabondage mental apporte une créativité renouvelée à l’esprit, par un système qui va laisser venir des idées spontanément. A contrario, le fait dans notre société de coller à un enfant l’étiquette de TDA est une attitude bizarre selon lui : “Le vrai problème c’est le déficit de la capacité d’inattention”. Il relève combien le déficit d’inattention a un impact réel sur le cerveau et prône l’interdiction indispensable du portable à l’école : “S’il est sollicité en permanence, le cerveau n’est plus disponible pour les apprentissages“.
Dans les écoles, il faudrait aussi selon lui, permettre aux enfants de se lever s’ils sont trop longtemps assis, sans que cela soit autorisé n’importe comment. “Cela permet au cerveau de penser autrement et les solutions vont se mettre en place beaucoup plus naturellement”.
Comment mettre le cerveau en mode ‘par défaut’ ?
Pour mettre le cerveau en mode pause, voici aussi bien pour les adolescents que pour les enfants, les recommandations de Bruno Humbeeck.
Se déconnecter de son portable et des notifications et ne pas considérer que scroller est une vraie pause. Le conseil du psychopédagogue est donc de faire une pause sans son portable, “sinon le cerveau va se mettre en position de vigilance”
Toujours sans son portable, faire une pause dans un parc ou se promener en forêt où l’on peut y maintenir notre attention flottante
Effectuer des gestes simples, naturels qui font appel à un automatisme cérébral tels que jouer aux fléchettes ou de jeter des boulettes de papier dans une corbeille, “sauf si vous avez un souci de performance”
Dans le cadre professionnel, se relaxer dans des espaces aménagés, ce qui au final nous rendra plus performant. “C’est pourquoi un employeur efficace est celui qui va vous permettre de faire une vraie pause”
Réhabiliter la sieste, “ce qui serait plus respectueux de nos rythmes naturels et physiologiques et du rythme de notre cerveau qui a besoin de ces moments de sieste. La sieste est la pause cérébrale garantie”
Accepter et tolérer l’ennui, mais pas celui qui crée une souffrance et peut devenir problématique. “Les adolescents le font très bien […] Ils sont capables de le faire car s’ils ne le faisaient pas, ils seraient soumis à un stress absolu”. Cette capacité à l’ennui, beaucoup d’adultes l’ont perdue, “étant souvent tendus vers ce que l’on doit faire et à fuir ce que l’on est en train de faire. On est toujours à cheval entre ces deux types d’activité”
Marcher de façon nonchalante, “qui est la véritable démarche de l’être humain. Il y a certaines cultures où c’est beaucoup plus accepté de marcher lentement et en chaloupant”.