Plusieurs fois reporté, le stage professionnel d’un an à l’issue des études de psychologie clinique sera obligatoire pour les étudiants proclamés à partir de l’année académique 2025-26. Mais, selon la ministre-présidente de la Fédération Wallonie-Bruxelles, l’offre de stage reste insuffisante ; seuls 8 % des étudiants pourraient, à ce jour, trouver une place.
Un stage d’au moins 1.680 heures, à réaliser après cinq années d’étude. La mesure, déjà reportée à trois reprises, concernera les futurs psychologues et orthopédagogues cliniciens diplômés à partir de l’année académique 2025-26, y compris les étudiants proclamés en janvier 2026. Pourtant, l’offre de stage demeure « largement insuffisante » pour accueillir tous les étudiants concernés.
En commission de l’enseignement supérieur, la ministre-présidente de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), Elisabeth Degryse (Les Engagés), a indiqué que la situation n’avait pas évolué depuis l’an dernier : « Par conséquent, seuls quelque 8 % des étudiants pourraient trouver une place de stage. La pénurie de maîtres de stage constitue un obstacle majeur à la mise en œuvre effective de la mesure. »
En 2024, cet obstacle avait à nouveau conduit le ministre de la Santé, Frank Vandenbroucke (Vooruit), à reporter l’entrée en vigueur de l’obligation. Le stage ne peut en effet s’effectuer que dans une structure agréée, sous la supervision d’un maître de stage reconnu, lui-même tenu de suivre une formation. « L’obligation de stage en psychologie clinique a été décidée pour renforcer la qualité de la formation », a ajouté Elisabeth Degryse, en précisant que des efforts ont été déployés pour améliorer la communication et informer les étudiants des développements de ce dossier.
Pas de la compétence des universités
Depuis le 1er janvier 2020, et la reconnaissance du titre de « psychologue clinicien », les psychologues doivent obtenir un agrément pour porter ce titre, moyennant la réalisation d’un stage professionnel d’une année. Faute d’un nombre suffisant de maîtres de stage, des mesures transitoires ont été mises en place. Ainsi sont exemptés d’un stage professionnel les titulaires d’un diplôme de psychologie délivré avant septembre 2016 et qui disposent d’une expérience professionnelle de trois ans, les étudiants en psychologie clinique qui ont entamé leurs études avant l’année académique 2016-17 (quelle que soit l’année d’obtention du diplôme) et ceux qui obtiennent leur diplôme avant l’année académique 2025-26.
Si le stage d’un an répond à une demande du secteur et des étudiants, soucieux de disposer d’une formation de qualité, cette année supplémentaire n’est pas organisée par les universités. « Il s’agit d’une compétence fédérale, s’inscrivant dans une volonté d’améliorer la qualité des soins, bien que la délivrance de l’agrément ne revienne aux entités fédérées », note Quentin Vassart, de l’Union professionnelle des psychologues cliniciens francophones. « Nous avons demandé des informations supplémentaires au cabinet du ministre Vandenbroucke concernant le déploiement concret, mais jusqu’à présent, nous n’avons reçu aucune réponse. »
Les facultés universitaires ont pour mission d’informer les étudiants et les étudiantes, ainsi que les diplômés. « L’implémentation de ce “stage” ne relève pas de la compétence des universités, mais bien de la FWB pour la partie francophone du pays », insiste Céline Douilliez, vice-doyenne de la faculté de psychologie à l’UCLouvain. Elle constate une moindre inquiétude que les années précédentes dans le chef des étudiants : « Pour autant, la situation des places de stage demeure tendue, déjà au niveau du master, et ce, au vu du nombre élevé d’étudiants inscrits. »
Une impasse pour 92 % d’étudiants ?
Face au chiffre de 8 % avancé par la ministre en charge de l’Enseignement supérieur, Elisabeth Degryse, la Fédération des étudiants francophones (FEF) a décidé d’interpeller le ministre de la Santé pour clarifier la situation : « Nous nous étions accordés sur un report de deux ans, le temps que d’autres places de stages voient le jour. Or, la pénurie met les étudiants dans une situation compliquée puisque cela revient à condamner 92 % d’entre eux à une impasse dans leur parcours de formation. »
Une question reste évidemment en suspens : comment trouver, en l’espace de quelques mois, des maîtres de stage pour 92 % des futurs diplômés ? « Je ne vois pas comment ils vont faire », pointe Christophe Leys, doyen de la faculté de psychologie à l’ULB. « Il n’y a déjà pas suffisamment de maître de stage pour les étudiants de master, et pour les diplômés, le stage devra a priori être rémunéré. » Pour Quentin Vassart, il faut plutôt se demander « pourquoi ». « Des retours que j’ai, très peu de maîtres de stage se manifestent. Il n’existe aucun incitant financier pour mettre en place cette année de pratique supervisée. » Si la situation devait rester inchangée, la FEF réclame un nouveau report, « afin que les étudiants ne soient pas pénalisés par une situation qui échappe entièrement à leur responsabilité ».