Les coupes budgétaires qui mettraient certains établissements de l’enseignement qualifiant en péril, et le manque de concertation avec la ministre Glatigny est pointé du doigt.
Les crises dans l’enseignement francophone ne datent pas d’aujourd’hui. La ministre Désir (PS) en charge de ce département dans le précédent gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, a été confrontée à des mouvements de colère. Mais avant la grève de ce mardi, certains ressortent de l’armoire aux horreurs les mouvements des années 1990, et notamment la grève historique de 1996 avec des débrayages durant quatre mois. On n’en est pas encore là, et pour cause, il s’agissait à l’époque pour la toute jeune Laurette Onkelinx – PS également – de réduire fortement l’emploi. S’il existe cependant une comparaison entre 2024 et les années 90, c’est dans la dimension existentielle du mouvement de protestation dont on annonce ici qu’il serait fortement suivi sur le terrain et soutenu de façon inhabituellement unanime par les différents acteurs de l’école – syndicats et fédérations de pouvoirs organisateurs, du libre comme de l’officiel.
La cible des grévistes ce mardi est en principe circonscrite à l’avant-projet du décret programme qui touche notamment l’enseignement qualifiant et prévoit surtout de réduire l’encadrement des élèves. Ils dénoncent les coupes budgétaires qui mettraient certains établissements de l’enseignement qualifiant en péril, mais aussi le manque de concertation et surtout d’ouverture de la ministre de l’Education, Valérie Glatigny (MR), contrairement à ce qui avait été annoncé dans la déclaration de politique communautaire. Mais ces interrogations ponctuelles portent en elles des craintes encore plus fondamentales avec surtout la perspective d’un « éléphant dans la salle des profs » depuis l’arrivée aux commandes du nouveau gouvernement francophone MR/Engagés : le passage des enseignants d’un statut historique de fonctionnaire à un contrat à durée indéterminée – comme tout le monde est-on tenté de dire – est une vraie évolution pour le secteur et tout son personnel.
Et donc, cette grève de mardi sert d’avertissement à la ministre qui a grand intérêt lorsqu’elle présentera ce changement de statut, à venir avec un texte très précis, chiffré, détaillant tous les impacts pour toutes les classes d’âge, de façon très pédagogique, mais surtout en ayant vraiment balisé au préalable ce difficile accouchement par des discussions, de l’écoute et de la concertation. Sur le fond, certaines données sont claires : d’une part, la Fédération Wallonie-Bruxelles doit faire des coupes budgétaires auxquelles l’enseignement pourra difficilement échapper, et d’autre part la pénurie de professeurs doit trouver une solution rapide qui passera à l’évidence par une amélioration d’un début de carrière aujourd’hui chaotique, incertain et donc peu propice à attirer les jeunes qui veulent construire un projet de vie. Mais ce double enjeu, hautement inflammable, exige des talents d’orfèvre autant que du caractère. Dans les années 90, Laurette Onkelinx qui n’en manquait pas, a bien failli craquer.